Ci-dessous des extraits d’une interview du journaliste progressiste saoudien Mansour Al-Hadj, basé à Washington, diffusée sur Al-Alam TV le 11 mars 2011:
Voir les extraits-vidéo sous-titrés en anglais sur MEMRI TV,
http://www.memritv.org/clip/en/0/0/0/0/0/0/2862.htm .
« Tôt ou tard, la révolution atteindra l’Arabie Saoudite »
Mansour Al-Hadj: Il y a eu des manifestations dans plusieurs villes [d’Arabie Saoudite]: à Safwa, Awamia et Hofuf. Mais dans les grandes villes comme Riyad et Djeddah, l’imposante présence des forces de sécurité a peut-être perturbé, et affaibli le désir de descendre dans la rue. Je peux très bien le comprendre, parce que j’ai vécu en Arabie Saoudite, et j’ai l’habitude de ces situations. Mais cela ne change rien au fait que les gens ont des droits et des exigences élémentaires.
La révolution a commencé en Tunisie, et sa flamme s’est propagée à l’Egypte, la Libye, au Yémen, à Bahreïn et Oman – et j’espère qu’elle atteindra le Soudan. Et tôt ou tard, elle atteindra l’Arabie saoudite.
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« le temps des pétitions et des communiqués est révolu (…) L’approche consistant à mendier et ramper a fait son temps »
À mon avis, le temps des pétitions et des communiqués est révolu. Nous sommes entrés dans l’ère de la rue. Les gens descendent dans la rue pour obtenir gain de cause. L’approche consistant à mendier et ramper a fait son temps.
Aujourd’hui, le gouvernement saoudien, et en particulier la famille régnante, sont confrontés à un gigantesque défi. Jusqu’à présent, on n’a pas exigé la destitution du régime et l’interrogatoire des membres de la famille régnante, mais c’est ce qui sera exigé si celle-ci ne met pas cartes sur table.
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« Certains érudits religieux émettent des fatwas ridicules. Ils ont émis une interdiction de manifester »
Le problème est que la famille régnante en Arabie Saoudite se sert des ressources du pays – des pétrodollars – pour exercer des pressions et « acheter » la conscience du peuple. Les journaux saoudiens, par exemple, sont contrôlés par des soi-disant « libéraux » qui n’ont rien de libéraux. Ils travaillent pour le gouvernement. Si demain vous écrivez quelque chose qui ne plaît pas au gouvernement, il vous limogera. Vu que le gouvernement saoudien opprime les manifestants, ou rend les érudits religieux…
Personne ne respecte plus les érudits religieux. Chaque jour ou un jour sur deux, l’Etat leur demande d’émettre une fatwa, et ils émettent une fatwa. C’est l’une des raisons pour lesquelles les gens ne font plus confiance aux érudits religieux, et c’est pourquoi certains érudits religieux se sont rebellés contre l’Etat – parce que, en tant qu’homme de religion, vous êtes censé ne craindre personne, hormis votre Dieu.
Mais aujourd’hui, certains érudits religieux émettent des fatwas ridicules. Ils ont émis une interdiction de manifester. Seul Allah a le privilège de permettre et d’interdire.
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« Tant que l’Arabie saoudite contrôlera un quart de la production mondiale du pétrole et des réserves de pétrole, elle ne rendra de comptes à personne »
Tant que l’Arabie saoudite contrôlera un quart de la production mondiale de pétrole et des réserves de pétrole, elle ne rendra de comptes à personne. C’est le problème du monde. Les pétrodollars sont distribués dans toutes les directions pendant que la faim sévit parmi les Saoudiens. C’est le problème. L’argent achète les gens partout dans le monde. Même ici, à Washington, le gouvernement saoudien et la famille Saoud ont réussi à contrôler certaines personnes, grâce à cet argent, qui appartient au peuple saoudien.
Hier, le prince Turkey Al-Faisal a écrit dans Al-Sharq Al-Awsat: « Nous vous avons guéri de la variole, nous vous avons unis… » Un prince n’a pas à parler de cette manière – pas ces gens.
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« l’administration Obama n’aime pas le changement. Dès le début, elle a décidé de traiter avec les dictatures du monde arabe »
L’administration actuelle – l’administration Obama – n’aime pas le changement. Dès le début, elle a décidé de traiter avec les dictatures dans le monde arabe. Elle soutient le camp des modérés contre le camp de la résistance… Sa ligne directrice aujourd’hui est de s’entendre avec les gens au pouvoir.
Mais au bout du compte, les intérêts des États-Unis passent avant tout. Tout comme les États-Unis ont renoncé à Hosni Moubarak [en Egypte] et à Zine El Abadine Ben Ali [en Tunisie], ils renonceront à la famille régnante en Arabie saoudite, si les revendications du peuple ne sont pas entendues. Si le peuple veut remplacer la famille royale, les Etats-Unis n’auront d’autre choix que d’établir des liens avec le peuple. […]