Dans un article récemment paru dans un organe de presse afghan en ligne, [1] le renommé auteur afghan Massoud Qiam appelle l’Occident à tenir compte des besoins de la nation afghane, et non uniquement de ses propres besoins.
Massoud Qiam réside actuellement hors d’Afghanistan, en raison de menaces de mort intervenues suite à la publication de ses rapports d’enquêtes.
Dans l’article dont voici des extraits, il affirme que les services de renseignement pakistanais continuent de protéger les talibans en Afghanistan, tandis que l’Occident considère le pays comme un champ de bataille.
« C’est avec une détermination équivalente à celle des Etats-Unis et de l’Otan pour déloger Al-Qaïda et les talibans d’Afghanistan que le Pakistan œuvre pour les maintenir en place. »
« C’est avec une détermination équivalente à celle des Etats-Unis et de l’Otan pour déloger Al-Qaïda et les talibans d’Afghanistan que le Pakistan œuvre pour les maintenir en place. L’offensive intervenue la semaine dernière à la frontière entre l’Afghanistan et le Pakistan dans la province du Nuristan, tuant huit soldats américains, a été la plus meurtrière pour les forces américaines en plus d’un an. Voilà exactement le type de violences que les services secrets pakistanais planifient et supervisent – des offensives conçues spécialement pour dissuader les gouvernements étrangers d’envoyer des renforts. »
« Les talibans ne sont pas complètement contrôlés par le Pakistan, mais ils recourent bien aux renseignements militaires et sont financièrement soutenus par le Pakistan. »
« Les talibans ne sont pas complètement contrôlés par le Pakistan, mais ils recourent bien aux renseignements militaires et sont financièrement soutenus par le Pakistan. C’est le Pakistan qui lance l’idée, par exemple, d’attaquer les troupes de l’OTAN au nord en tuant des soldats allemands, italiens ou français, dont les Etats se demandent déjà s’ils ne devraient pas retirer leurs troupes. Ils accentuent en outre les pressions sur l’OTAN, dans le but de chasser l’organisation d’Afghanistan.
Bien que cela puisse faire l’effet d’une diversion, le gouvernement pakistanais n’a pas envahi la vallée de Swat et tué des milliers de soldats talibans pour convaincre l’Occident de son combat actif contre les talibans. Le Pakistan ne veut tout simplement pas des talibans sur son territoire. Le gouvernement pakistanais ne tuera pas les talibans en Afghanistan, mais au Pakistan si. »
« Le gouvernement pakistanais bénéficie du soutien des talibans afghans »
« Le gouvernement pakistanais bénéficie du soutien des talibans afghans. Quand les talibans ont obtenu des troupes et le pouvoir, ils se sont mis à désobéir aux ordres du Pakistan. Par exemple, le Pakistan a soutenu la demande du gouvernement américain pour que les talibans lui remettent Oussama Ben Laden, mais les talibans n’ont pas obtempéré. Même si les talibans afghans n’obéissent qu’à la moitié des ordres pakistanais, le relation demeure intacte. Le Pakistan ne souhaite pas un contrôle absolu des talibans ; en revanche, il lui importe de diriger l’Afghanistan dans ses propres intérêts. »
« Le fait que le Pakistan encourage les Afghans à la talibanisation a des effets secondaires au Pakistan. »
« De même que les cachets contre les maux de têtes ont des effets secondaires, le fait que le Pakistan encourage les Afghans à la talibanisation a des effets secondaires au Pakistan. Une frontière sure permet de contrôler l’insurrection en Afghanistan. Pour cela, le Pakistan doit encourager ceux qui vivent à la frontière à devenir de combattants extrémistes. Et la violence de la région déborde sur le territoire pakistanais. »
« Les dirigeants américains, européens et même afghans ne voient pas l’Afghanistan comme une nation, mais comme un champ de bataille »
« L’envoi de nouvelles troupes étrangères aidera celles qui se trouvent sur place à écarter les talibans, mais n’arrangera pas complètement la situation en Afghanistan. Un problème fondamental est que les dirigeants américains, européens et même afghans ne voient pas l’Afghanistan comme une nation, mais comme un champ de bataille. Ils mettent au point des stratégies centrées sur leurs propres programmes politiques, non sur le bien-être du peuple afghan. Il est impératif qu’ils pensent à la justice dans ce pays livré aux conflits sociaux. »
« Si nous amenons la justice, les moudjahidine et les talibans ne pourront plus de solliciter le soutien du peuple »
« De nombreux politiciens afghans ne se trouvent pas physiquement avec les talibans, mais leur sympathie va vers eux et ils les soutiennent. Le gouvernement afghan ne sera jamais capable de parler directement aux talibans, mais nous pouvons forcer ces leaders corrompus à quitter le gouvernement. Si nous amenons la justice, les moudjahidine et les talibans ne pourront plus solliciter le soutien du peuple, et les citoyens afghans comprendront que les criminels doivent être écartés du système gouvernemental. Nous devons empêcher les politiciens pakistanais de maltraiter le peuple afghan en encourageant les conflits internes.
Il est possible d’y arriver avec le soutien de la communauté internationale. Le peuple d’Afghanistan n’y arrivera pas tout seul. La stabilité et la sécurité peuvent être assurées à court terme grâce à des gouvernements de coalition. Il faut prendre le problème à la racine. Les moudjahidine et les talibans jouent le rôle des partis politiques, mais ils forment dans les deux cas des organisations criminelles qui ont commis des crimes pendant les trente années passées. Le président Obama doit envisager une « justice de transition », et si la communauté internationale ne négocie pas avec le gouvernement pakistanais, le problème des talibans ne se règlera pas.
[1] www.kabulpress.org, Afghanistan, 23 octobre 2009.