Dans le journal saoudien Al-Madina du 20 mai 2007, un article humoristique intitulé « M. Chirac, pourquoi ? » commente la cérémonie de passation du pouvoir qui a eu lieu à l’Elysée le 9 mai. L’auteur, Jamil Farsi, fait semblant de ne pas comprendre comment le président français a pu quitter le pouvoir sans résistance, comme cela aurait été le cas dans les dictatures arabes, selon l’auteur. Sous forme de lettre ouverte à Chirac, Farsi écrit:
« Je vous écris au nom des millions [d’entre nous] dans le monde arabe, [de la distance qui sépare] le lever du soleil sur le Golfe [Persique] et le coucher du soleil derrière les sommets des montagnes de l’Atlas [au Maroc]. »
« Nous avons été choqués de vous voir à lé télévision mercredi [9 mai 2007] quitter l’Elysée et passer à Sarkozy la présidence de l’Etat et [avec elle] la mallette nucléaire française. Comment lui avez-vous permis d’entrer à l’Elysée à votre place ? Comment pouvez-vous quitter la nation en cette période historique ? Vous n’êtes resté qu’une seule décennie au palais de l’Elysée – qu’est-ce qu’une seule décennie par rapport à l’âge des peuples ? Où est la stabilité ? Pourquoi privez-vous la nation française du privilège de la stabilité ? Et [en outre] vous quittez l’Elysée sur vos deux jambes, sans canne, jouissant de santé et de sagesse. Comment pouvez-vous respecter [le verdict] des urnes ? »
« Pourquoi n’avez-vous pas annulé les résultats des élections ? Peut-être que celui qui les a emportées ne veut pas le bien de la France, ou veut s’attaquer à la démocratie. O Chirac, vous auriez dû nous consulter dès le début ; le monde arabe aurait pu vous envoyer une équipe pour arranger les élections afin que la victoire vous soit acquise, et ce bien que vous ne vous soyez pas présenté aux élections. Peut-être que la nation française ne connaît pas son intérêt, mais vous, vous savez ce qui vous en rapproche. »
« Voyez, Chirac: la constitution française vous autorise à déclarer l’état d’urgence en cas de menace contre la nation française, et y aurait-il une menace plus grande que celle-ci ? C’est pourquoi vous auriez dû manifester des réserves face à la personne de Sarkozy ; nous pouvons vous envoyer du monde arabe des docteurs en droit constitutionnel pour vous trouver une solution juridique. Et si cela s’avère nécessaire, nous pouvons vous envoyer quelques articles constitutionnels. Mais vous ne voulez pas [d’une solution] constitutionnelle et préférez une solution populaire, nous pouvons vous organiser quelques manifestations [de soutien]: ‘Par l’âme, par le sang, nous nous sacrifions pour vous, ô Chirac’ ! »
« J’ai ouvert le journal Le Monde et n’ai trouvé aucune page publicitaire en signe d’accueil à Sarkozy. Où sont les riches de France ? Où sont les hommes d’affaires ? Quant au magazine Paris Match, c’est le pire, il n’y a eu aucun article d’adieu [à Chirac]. Où sont les intellectuels ? Comment ont-il oublié les festins de dîner avec vous ? » (…)
Nous avons souffert d’entendre à la télévision que vous avez quitté [le pouvoir] sans domicile [fixe], à part un appartement offert par vos amis. L’Assemblée nationale qui se réunit aurait pu faire de l’Elysée un domicile permanent pour vous et choisir un autre palais pour le nouveau président. Pour chaque président un palais, et pour la nation les huttes. »
« Et puis, comment avez-vous pu partir sans domicile ? Franchement, pourquoi n’avez-vous pas ouvert un portefeuille d’investissements – comme cela se fait dans notre monde arabe [chez les dirigeants] – dont la valeur grimpe lorsque le marché s’effondre (…) ? Bon, oubliez le portefeuille d’investissements – n’avez-vous mis en place aucun plan immobilier ? Aucun terrain ne vous a plu ? Moi, personnellement, j’ai remarqué l’existence d’un terrain vague au début de la rue Saint-Honoré en face du palais de l’Elysée – comment ne l’avez-vous pas vu ? Trois rues après le palais de l’Elysée se trouve un jardin inutile. Comment ne l’avez-vous pas remarqué ? A la fin de l’avenue des Champs-Élysées, il y a un terrain vague – pourquoi ne vous en êtes-vous pas emparé ? Le terrain de la Tour Eiffel est formidable. Qui en a besoin maintenant qu’il a vieilli ? C’est une merveilleuse occasion que vous aviez ! Le parking de l’angle du quartier latin est trop grand, et qui a besoin d’un parking alors que le métro est plus rapide et moins polluant ? C’est un terrain en or. A la sortie du tunnel du Sacré-Cœur, il existe un formidable terrain tout en longueur – un reste du tunnel qui fait 9885 mètres, un reste, par Allah, [rien qu’]un reste ! Pourquoi ne l’avez-vous pas remarqué ? Se peut-il que vous fassiez des allers-retours dans les rues de Paris les yeux fermés ?! »
« Alors oui, vous méritez de quitter l’Elysée. Vous avez déçu les foules arabes !! »
« Que votre mère vous perde et vous pleure ! Misérable est la vie des Européens ! »