Dans un article daté du 15 janvier 2007, paru dans Al-Sharq al-Awsat en ligne, le chroniqueur réformiste et ancien ministre de l’Education Ahmed Al-Rabei a appelé l’Iran à cesser d’émettre des menaces et à renouer le dialogue avec la communauté internationale, afin d’éviter une défaite face aux Etats-Unis. [1] Dans un autre article, daté du 19 janvier et intitulé “L’Iran en crise de modestie”, il décrit l’Iran comme le véritable facteur de guerre et de chaos dans la région. [2]
Voici les articles traduits de l’anglais:
15 janvier 2007
“L’Iran s’imagine détenir une énorme force militaire dotée d’une force de frappe décisive”
“En Amérique, ils mentent pour des raisons tactiques, répétant qu’une action militaire contre l’Iran est peu probable. Toutefois, en Iran, par ignorance, ils répètent que l’action militaire américaine contre leur pays est impossible, vu que les Etats-Unis sont ‘incapables’ (d’entreprendre une telle action) !
Nous disons – et nous espérons nous tromper dans notre analyse – que les préparatifs à d’éventuelles frappes militaires contre les installations nucléaires sont déjà dans leur phase finale. A moins d’un miracle politique ravivant le dialogue interrompu entre l’Iran et la communauté internationale, l’Iran et les Etats voisins ne devraient pas être surpris par un scénario incluant une action militaire américaine.
Les Arabes et les musulmans s’imaginent un certain nombre de choses de façon générale, illusions qui se sont à plusieurs reprises avérées indéfendables. Il a été prouvé que les Arabes prennent leurs désirs pour des réalités…
L’Iran s’imagine être un immense Etat militaire muni d’une force de frappe décisive. Ce serait en effet le cas si l’Iran était confronté à l’un de ses voisins. Mais le fait est que face à l’Amérique, l’Iran est un petit Etat sans défense. Il subirait ce que les Arabes ont subi en 1967 et ce que l’Irak a subi quand Saddam a rejeté avec entêtement toute solution pacifique. L’Amérique sera en mesure d’imposer ses conditions. Ce ne sont pas ici des considérations d’amour ou de haine. D’un point de vue historique et géographique, l’Iran est plus proche (des pays arabes) que l’Amérique, et nos relations culturelles et historiques avec l’Iran pèsent plus lourd que nos liens avec l’Amérique. (Mais) le fait est que l’équilibre des forces est nettement favorable aux Etats-Unis et à l’alliance occidentale, en particulier à l’alliance européenne!”
“La direction iranienne (doit tenir compte des) intérêts de son peuple… et comprendre que les grands mots ne changent pas les faits politiques”
“Une autre illusion est celle du ‘bourbier irakien’ dans lequel l’Amérique se trouverait empêtrée. J’aimerais que le monde arabe ne croie pas à cette affirmation. L’Irak n’est pas un autre Vietnam, et l’Amérique est capable de mener plus d’une guerre (à la fois), vu ses importantes capacités politiques et technologiques.
Téhéran doit reconsidérer son discours politique. Les menaces creuses n’ont jamais rien donné dans l’histoire moderne. Nul n’a jamais rien accompli sans se servir de sa raison, sans être conscient de ses capacités et agir en conséquence, en se basant sur la règle: ‘Dieu est favorable à ceux qui savent ce qu’ils valent.’
Israël possède un arsenal nucléaire, mais aucun responsable israélien n’ose évoquer ce fait. Ils vont jusqu’à nier l’existence de ces armes. A Téhéran, ils en sont encore aux premières étapes de l’enrichissement (d’uranium), et pourtant nous entendons un langage de menaces et d’entêtement.
Si seulement la direction iranienne pensait aux intérêts de son peuple et cherchait à comprendre les complexes équations politiques internationales de notre temps ! (Elle devrait) comprendre que les grands mots ne changent pas les faits politiques et qu’il est plus aisé et utile de chercher d’autres solutions pratiques vis-à-vis de la communauté internationale que (de prononcer des) paroles désuètes (et de croire) qu’une voix plus forte équivaut à un argument plus fort !”
29 janvier 2007
L’actuelle direction iranienne souffre de… la croyance que l’Iran est une superpuissance.
“L’actuelle direction iranienne souffre d’une maladie chronique: celle de croire que l’Iran est une superpuissance, et que des exercices militaires réussis signifient que l’Iran est capable de remporter une véritable guerre contre des adversaires plus capables, plus efficaces et avancés d’un point de vue technologique !
Le problème de l’actuelle direction iranienne est qu’elle ne veut ni apprendre de l’histoire, ni tenir compte des données géographiques.
On peut trouver un exemple d’une telle attitude dans les pages des livres d’histoire iraniens de l’époque ou le Shah d’Iran estimait que sa politique maladroite à l’encontre des Etats du Golfe, et en particulier son insistance à dire que le Bahreïn faisait partie de l’Iran… pourraient améliorer sa position. En conséquence, le Shah a perdu le soutien de ses voisins, après avoir perdu celui de son peuple, et le reste de l’histoire est connu.
Un autre exemple est celui de la Révolution islamique d’Iran. Plutôt que d’essayer de résoudre les problèmes du chômage et de la pauvreté de la population, les nouveaux révolutionnaires ont décidé d’ ‘exporter la révolution’, et ont ainsi fini par attiser les sentiments négatifs de leurs voisins.
Après tout, une révolution n’est pas une marchandise que l’on importe ; c’est un nouveau régime qui établit un exemple pour les autres. Les agissements des révolutionnaires à Téhéran furent une catastrophe plutôt qu’un exemple.
La conséquence fut que des individus comme Saddam Hussein ont entrepris de devenir des défenseurs face au dénommé ‘Magi persan’, ce qui a été une tragédie pour tous.”
L’Iran est le ‘véritable instigateur de la guerre et du chaos’ et est “actif jusqu’à l’écoeurement” avec ses actes de violence au sein des autres nations.
“Actuellement, le gouvernement iranien se répète, mais d’une façon plus provocatrice. En effet, l’Iran est activement impliqué au Liban, ce qu’il ne nie pas. (Les Iraniens) sont les véritables instigateurs de la guerre et du chaos, par l’ ‘argent propre’ (le financement du Hezbollah) qu’ils ont pris aux pauvres.
En outre, ils sont impliqués dans les affaires irakiennes et palestiniennes. Ils sont impliqués dans les actes de violence au Yémen et sont actifs jusqu’à l’écoeurement en Syrie, en Egypte, au Pakistan et dans d’autres pays – alors que chez eux, les problèmes de chômage et de pauvreté empirent, et que leurs revenus provenant du pétrole servent au développement de la technologie nucléaire et de la construction de l’arsenal militaire (iranien). Le peuple iranien ne mérite pas cette politique infantile, et la région ne mérite pas ces mesures frivoles.
Les populations du Golfe, aussi bien du côté iranien que du côté arabe, ont besoin de paix, de stabilité et d’échanger des marchandises plutôt que des missiles, des prisonniers et des blessés, comme ils font depuis plusieurs années. L’Iran doit marquer un arrêt au niveau de la raison et de la logique. La clameur des mots creux ne résoudra pas les problèmes de l’Iran, et l’illusion du succès d’une telle politique doit prendre fin, au nom de l’intérêt de la région et de celui du peuple iranien, qui a chèrement payé ces aventures et guerres pendant de nombreuses années. L’Iran doit faire preuve d’un certain degré de modestie et prendre conscience de ses véritables capacités. ‘Dieu préfère ceux qui savent ce qu’ils valent’ – c’est ce que nous devons toujours garder en mémoire !”
[1] http://aawsat.com/english/news.asp?section=2&id=7666, le 15 janvier 2007.
[2] http://aawsat.com/english/news.asp?section=2&id=7827, 29 janvier 2007.