Le 14 décembre 2004 sur la chaîne iranienne Jam-E-Jam1, le vice président iranien Gholam-Reza Aqa-Zadeh, responsable de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique, a tenu les propos suivants: “Nul en Iran n’envisage d’abandonner l’enrichissement de l’uranium contre ce que certains médias appellent ‘une récompense’ européenne. Cette idée n’a aucun fondement. En Iran, la notion même d’abandon du stricte minimum [l’enrichissement de l’uranium] pour une quelconque récompense est inexistante. Il n’y a rien de tel. Les pourparlers et les accords de Paris ont porté sur ce que nous méritons et dont nous avons été privés pendant de nombreuses années.” [1]
Deux jours plus tôt, l’ancien secrétaire général du Conseil de coopération des Etats du Golfe, M. Abdallah Bishara estimait, dans une interview diffusée sur la télévision de Dubaï, que l’arme nucléaire iranienne représente un danger pour les pays de la région. Voici des extraits de l’interview: [2]
“M. Abdallah Bishara: Un Iran nucléaire représente un danger pour la région, pour le monde arabe, et peut même devenir une menace mondiale. Comme vous savez, l’Iran souhaite détenir des armes nucléaires dans un but dissuasif, par hystérie et par peur. Il existe une peur indélébile au sein des institutions gouvernementales iraniennes. On y considère l’arme atomique comme une arme de dissuasion face à la position américaine, la position israélienne, les offensives futures. Mais l’existence de l’arme nucléaire nuit gravement à nos intérêts.
Interviewer: Pourquoi les Etats du Golfe ne voient-ils pas dans l’arme atomique un facteur de rééquilibrage face à Israël, qui la possède déjà ?
Bishara: Allons, Daoud…
Interviewer: Je ne fais que poser une question.
Bishara: Non, mon ami. Ce sont des armes iraniennes, dont l’objectif est de servir les intérêts et l’idéologie de l’Iran. Rien n’est plus dangereux que d’accorder l’arme atomique à une idéologie. L’Iran est prisonnier de son idéologie, prisonnier de décisions ambiguës, prisonnier de son incapacité à prendre des décisions décisives, conformes aux normes internationales.
Interviewer: Mais l’Iran a abandonné l’idée d’exporter la Révolution.
Bishara: C’est faux. Pourquoi l’arme nucléaire ? Pourquoi l’implication [de l’Iran] en Irak ? Pourquoi soutenir le Hezbollah ? Pourquoi défendre la cause palestinienne ? Qu’est ce que tout cela a à voir avec l’Iran ? L’intention iranienne est-elle de défendre la cause palestinienne ou de soutenir les chiites de la région ? L’Iran soutient le Hamas et le Hezbollah, et refuse la logique des deux Etats, un Etat palestinien aux côtés d’un Etat israélien. L’Iran ne veut pas de cela.
Interviewer: Vous n’aimez pas que l’Iran défende la cause palestinienne ?
Bishara: Non, nous voulons qu’il défende la Feuille de route, les efforts de paix actuellement en cours et les négociations. L’Iran soutient le Hezbollah. La logique iranienne est la logique du Hezbollah, la logique de l’ingérence.
Interviewer: Vous espérez que l’Iran se pliera au plan américain?
Bishara: Non, je ne compte pas là-dessus, mais je demande à l’Iran de mettre fin à [sa politique d’]ingérence.
Interviewer: Pourtant, même l’opinion arabe accepte cette attitude. L’opinion arabe soutient l’approche iranienne et la résistance, non?
Bishara: Quelle opinion arabe, mon ami Daoud ?
Interviewer: Je vous le demande.
Bishara: Il n’y a pas d’ ‘opinion arabe’. Il n’y a que des intérêts. Je parle de la logique des intérêts dans la région. Notre intérêt est de parvenir à la stabilité et de résoudre le problème palestinien conformément à une carte de la paix. Notre intérêt, c’est la stabilité dans le Golfe, et une forme de coexistence [pacifique]. Nous voulons que l’Iran coexiste avec la logique de l’Etat et renonce à la logique de la révolution.”
[1] Jam-E-Jam1 (Iran), le 14 décembre 2004, sur www.memritv.org (clip n°430)
[2] Dubai TV, le 12 décembre 2004, sur http://memritv.org/Search.asp?ACT=S6 (clip n°426)