Les déclarations anti-américaines sont partie intégrante des médias égyptiens, et l’étaient plus particulièrement les semaines, les jours qui ont précédé le 11 septembre 2001. En voici quelques extraits:
Les Etats-Unis, ennemi des Arabes
Mahmud Abed El-Mounim Mourad, chroniqueur dans Al-Akhbar, le plus grand quotidien égyptien [Mahmud était autrefois membre du mouvement égyptien pour la paix], s’était déjà mis à contrer les médias et l’administration américaine il y a environ six mois. A la veille de la visite annuelle de Moubarak à Washington, Mourad avait traité le secrétaire d’Etat des Etats-Unis Colin Powell de “cervelle d’oiseau” [1], ainsi que d’ “imbécile” et de “menteur”. Ces déclarations, ajoutées aux articles racistes publiés dans Al-Akhbar au sujet de Powell, n’ont pas manqué de faire réagir les médias américains, forçant le président Moubarak à présenter ses excuses à Powell. Réprimandé, Mourad a rédigé un article sur l’importance stratégique des relations américano-égyptiennes, et depuis, a laissé tomber le sujet. En août 2001, Mourad a décidé qu’il était temps de reprendre ses attaques contre les Etats-Unis:
“Le conflit que nous appelons conflit israélo-arabe, est en vérité un conflit entre le monde arabe et le colonialisme occidental, plus particulièrement américain.”, a-t-il écrit. “Les Etats-Unis traitent les Arabes comme ses esclaves d’autrefois. Et ils y sont aidés par un ennemi de plus petite taille: Israël.” [2] “C’est un problème qui dépasse le conflit israélo-arabe. Le fond du problème, c’est le conflit arabo-américain – les Arabes doivent comprendre qu’il n’y a pas d’ “ami américain”: le but passé, présent, et futur des Etats-Unis est d’imposer une hégémonie mondiale, principalement au Proche-Orient et dans le monde arabe…” [3]
Dans un autre article, Mourad a affirmé: “La statue de la Liberté, qui se trouve dans le port de New York, doit être détruite à cause de la stupide politique américaine qui ne fait qu’enfoncer l’Amérique dans ses partis pris et son fanatisme aveugle.” Il a annoncé plus loin que c’était le “début de l’ère de l’effondrement américain.”
“Il est temps, aussi bien au niveau officiel que populaire, de prendre clairement position par rapport aux Américains”, a-t-il expliqué. “Bush junior se rendra compte qu’il dilapide les intérêts américains avec son parti pris non dissimulé pour les agresseurs israéliens… Si les Etats-Unis croient qu’une telle politique profite à leurs intérêts, ils ne vont pas tarder à se rendre compte que le prix d’un tel parti pris est très élevé, aussi bien au-dedans qu’au dehors de leurs frontières… Les Etats-Unis, c’est-à-dire les Américains comme les Israéliens, sont devenus, et pour cause, l’ennemi n°1 des nations.” [4]
Dans un autre article, Mourad a écrit: “Nous savons tous très bien que si les intérêts américains de la région étaient réellement menacés ou endommagés, les Etats-Unis n’hésiteraient pas à modifier leur position pour les mettre hors de danger… Si seulement nous pouvions convaincre l’Amérique que son parti pris pour Israël lui causera du tort…” [5]
Galal Aref, chroniqueur de l’hebdomadaire égyptien Akhbar al-Youm, s’y est mis aussi, affirmant que: “…les Etats-Unis, au sommet de leur imbécillité, espèrent que les intérêts américains dans la région auront toujours la vie sauve… Ils ignorent les faits historiques: la cruauté se retourne toujours contre celui qui l’exerce. Ainsi, même si l’oisiveté arabe n’est pas prête d’être surmontée, elle a des limites.” [6] Après Durban, il a écrit: “Les Etats-Unis ne comprennent pas qu’ils seront les seuls à payer le prix de leur chute [à Durban].” [7]
Bassiouny El-Hilouani, chroniqueur du quotidien officiel Akidathi, a appelé les Arabes à mettre en vigueur des mesures dissuasives contre Israël et les Etats-Unis: “Chaque jour, George Bush révèle sa haine, héritée de son père, contre les Arabes et les musulmans… La haine de George W. Bush pour les Arabes et les musulmans égale en force celle de Sharon… Les Arabes et les musulmans vont-ils finir par s’en rendre compte et traiter les Américains comme ils méritent d’être traités, où vont-ils continuer de se satisfaire de cette vie d’humiliations qu’ils se sont imposés à eux-mêmes quand ils ont accepté que les Etats-Unis s’occupent de leurs affaires…? Si les Arabes s’unissent dans une même orientation, ils pourront à eux seuls représenter une force de dissuasion contre Israël et tous ceux qui soutiennent son agressivité et son arrogance. Les Arabes et les musulmans vont-ils essayer cette solution, ne serait-ce qu’une fois? J’espère que oui.” [8]
Attaques personnelles contre Bush
Certains chroniqueurs ont menacé Bush dans sa personne. Dans un article intitulé “Oh non, M. Bush”, Galal Dweidar, directeur de Al-Akhbar, quotidien subventionné par le gouvernement, a réagi à l’affirmation “provocatrice” de Bush selon laquelle Washington ne pouvait pas intervenir plus qu’il ne l’avait déjà fait dans les affaires du Proche-Orient. “En réponse à ces idioties”, Dweidar a écrit que ” Je vous dis, M. Bush, que vous êtes le seul responsable de la piteuse image des Etats-Unis, dont le nom évoque le manque de crédibilité et de transparence, et est devenu synonyme d’oppression, d’indifférence à la justice et à la légitimité internationale… Les Etats-Unis ont été créés il y a 250 ans sur les principes de la liberté, la justice et l’égalité, et sont aujourd’hui un pays qui soutient la destruction de ces principes.”[9]
Le président Bush a été attaqué de manière encore plus directe dans un éditorial d’Al-Akhbar: “…Le président George Bush… dont on discute l’intelligence aux Etats-Unis, a décidé que la meilleure façon d’arriver à la paix au Proche-Orient était d’inviter Sharon, le verseur de sang…”
“George Bush, qui ne manque jamais d’apparaître sur les écrans télévisés et de verser une larme pour chaque Israélien mort dans une opération de martyre [palestinienne], opération qui est un acte de résistance entièrement légitime, ne critique jamais les actes de vengeance [d’Israël], ses bombardements, ses incursions…”
“Les Arabes doivent secouer la poussière de l’oisiveté de leurs épaules et prendre leurs affaires en main… au lieu d’attendre en vain qu’on leur ouvre les portes de la Maison blanche.” [10]
Le chroniqueur Abed El-Raof du journal Akhbar al-Yom, a noté: “Qu’arrive-t-il à l’Amérique? …Depuis que le petit Bush a fait son entrée à la Maison blanche, Les Etats-Unis se sont comportés comme un Etat raciste qui ne s’intéresse qu’à Israël et à sa défense, ignorant les crimes qu’il commet… Pourquoi le petit Bush devrait-il se plaindre d’Israël? Tous les fonds arabes reposent dans les banques américaines et tout le commerce des denrées arabes se fait avec les Etats-Unis! Tout le pétrole arabe coule vers les Etats-Unis et ses alliés européens qui se cachent derrière Bush, le cow-boy américain. Bush a surpassé tous les précédents présidents dans son amour d’Israël, à qui il se soumet sans hésitation et sans honte devant tous.”
“Même Truman, qui a créé l’Etat d’Israël, et Johnson, qui a conspiré avec Israël contre l’Egypte dans la guerre de 1967, n’ont pas fait ce que ce Bush a fait. La seule chose qui préoccupe ce dernier est de satisfaire le lobby juif pour que ce dernier sanctionne ses projets de loi au Congrès. Pour les Juifs américains, qui n’aiment pas Bush et n’ont pas voté pour lui,… le petit Bush s’humilie face au lobby sioniste et sacrifie tous les pays arabes et islamiques, sûr qu’il est que les Arabes ne peuvent pas mettre en danger son avenir politique… Mais les Etats-Unis et sa descendance pourrie, Israël, n’échapperont pas au châtiment, comme du temps d’Hitler et de Mussolini.” [11]
Ahmed El-Goundi, chroniqueur d’Al-Akhbar, a ridiculisé le président des Etats-Unis de la façon suivante: “Si seulement Bush, le président américain, s’intéressait de la même manière à la paix qu’aux animaux domestiques de la Maison blanche, la situation dans la région serait peut-être différente…”
“Les agences de presse nous ont appris que le président Bush a ouvert un nouveau site Internet sur la Maison blanche…dont une partie, selon ses instructions, est dédiée à ses deux chiens, Spot[ty] et [B]arney, India le chat, et Ofelia la vache, qui sont présentés comme des personnages de première importance, ayant un statut élevé au sein de la famille du président…”
“On peut en faire les déductions suivantes: D’abord, que le président Bush veut se présenter au public et présenter ses enfants comme des gens humains, ainsi que le prouve l’intérêt qu’ils portent aux animaux; deuxièmement, à la Maison blanche, on ne fait pas la différence entre les humains et les chiens, les chats et les vaches. Tous sont égaux aux yeux du président, et tous ont droit aux privilèges dont jouissent les résidants de la Maison blanche… Troisièmement, le rapport du président aux animaux est humain… Personne ne peut l’accuser de racisme ou de discrimination parmi les citoyens américains, même pas contre les animaux! Voilà qui représente le summum de la justice américaine et de la démocratie!! Il protège avec le même zèle les droits de l’homme que les droits des animaux…”