Voir les extraits vidéo sous-titrés en anglais sur MEMRI TV:
http://www.memritv.org/clip/en/3014.htm
Ci-dessous des extraits d’une interview de la princesse saoudienne Basma bint Saoud bin Abdel Aziz Aal Saoud, diffusée sur la BBC en arabe le 28 juin 2011:
Interviewer: Votre Altesse royale, vous défendez les droits des femmes, et dans vos écrits, vous faites courageusement la lumière sur la condition des femmes saoudiennes, demandant à ce qu’elles soient élevées au statut qu’elles méritent. Vous dites qu’on impose l’”esclavage” aux femmes saoudiennes. Est-ce le bon terme ?
Basma bint Saoud bin Abdel Aziz: C’est le moins qu’on puisse dire. Les Saoudiennes, et les femmes dans le monde arabe de façon générale, sont sujettes à des pressions qui n’existaient pas à l’époque de la Jahiliya, ni même avant.
Interviewer: Qui exerce ces pressions ?
Basma bint Saoud bin Abdel Aziz: La société, qui a hérité des coutumes tribales plutôt qu’islamiques. Nous connaissons bien les coutumes islamiques, et nous consultons le Coran si nous voulons connaître nos droits en tant que musulmans – les hommes comme les femmes. Les coutumes de nos sociétés arabes sont des coutumes tribales, pas islamiques. Ce qui est permis est clair, ce qui est prohibé est clair, et les châtiments devraient être les mêmes pour les hommes et les femmes.
“Qu’adviendra-t-il de ces futures générations, élevées par des femmes violentées et assujetties ?”
Ce que nous constatons aujourd’hui, toutefois, c’est que c’est toujours la femme qui trinque et qui subit des violences. C’est ainsi que l’on rend la société violente, vu que c’est la femme, victime de violence, qui élève les enfants. Elle élève les hommes et les femmes. Qu’adviendra-t-il de ces futures générations, élevées par des femmes violentées et assujetties, au sein d’un système de lois qui n’existe pas, en fait, dans notre charia ?
Interviewer: Mais est-ce vraiment le cas ? Les femmes n’ont-elles pas obtenu de nombreuses victoires et des postes importants sous le roi Abdallah ? Prenons l’exemple de Dr Khawla [Al-Kuraya] et de [la ministre] Norah Al-Faiz. Il y a des femmes universitaires et journalistes, vous inclus. Il semble parfois que l’on exagère en évoquant la situation des femmes saoudiennes.
“Est-il juste et équitable de se focaliser sur 1% des femmes et d’ignorer les 99% restantes ?”
Basma bint Saoud bin Abdel Aziz: Ce que vous dites est vrai pour 1% des femmes d’Arabie saoudite. Est-il juste et équitable de se focaliser sur 1% des femmes et d’ignorer les 99% restantes ? J’ai écrit dans de nombreux articles que les Saoudiennes, sous le règne du roi Abdallah bint Abdel Aziz, que j’aime de tout mon cœur, et que j’appelle, dans plusieurs de mes chroniques, le “lion de la péninsule Arabique”… En l’espace de cinq ans, il a permis un bond qualitatif du statut des femmes, un de ces bonds que la société saoudienne n’avait pas connu depuis 50 ans.
Interviewer: Il y a donc des progrès…
“ces progrès ne bénéficient qu’à un petit nombre de femmes, celles que l’on voit dans les médias. L’élite”
Basma bint Saoud bin Abdel Aziz: Oui, mais ces progrès ne bénéficient qu’à un petit nombre de femmes, celles que l’on voit dans les médias. L’élite. Les autres femmes sont soumises aux lois qui régissent l’ensemble de la société. C’est de cela que je parle. Je parle de la Saoudienne qui ne s’appelle pas Basma bint Saoud bin Abdel Aziz, ou Dr Khawla, qui ne porte pas l’un de ces noms que l’on trouve dans les médias. Nous vivons dans une société élitiste, et nous bénéficions de ces opportunités parce que nous avons été élevées dans des familles riches. Les autres femmes ne jouissent pas de ces opportunités.
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Le pionnier du changement dans ce domaine devrait être le ministre de la Justice. Le fait que le gouvernement promulgue des lois signifie qu’il existe des problèmes devant être résolus par ces lois. Mais ces lois se trouvent dans une impasse au ministère de la Justice, et rien n’est fait à part les présenter dans les médias.
Interviewer: Pour quelles raisons ?
“Nous devons changer la culture du peuple arabe”
Basma bint Saoud bin Abdel Aziz: Je leur ai demandé de me donner les raisons, et ils ont répondu: “La bureaucratie”. Je leur ai donc demandé qui était responsable de la bureaucratie, et ils m’ont répondu: “La culture arabe”. Je leur ai donc demandé qui était responsable de la culture arabe, et ils m’ont dit: “Le peuple arabe”. Sommes-nous responsables de l’état de notre culture ? Si la réponse est oui, nous devons prendre un peu de recul et déclarer: “Il nous faut changer la culture du peuple arabe”.
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Le Comité pour la promotion de la vertu et la prévention du vice a été fondé par mon défunt père, le roi Saoud bin Abdel Aziz. La raison et l’objectif de sa création étaient identiques à ceux du calife Omar ibn Al-Khattab, quand il fonda le Comité Hesbah, dont la mission était de prévenir le vice et de promouvoir la vertu. Les concepts ont toutefois évolué. Qu’est-ce que la prévention du vice, et qu’est-ce que la promotion de la vertu ? A l’époque du calife, ils se rendaient dans les marchés, surveillaient les [pratiques des] marchands et les prix, guettaient les pots de vin et la corruption administrative. Telle était leur mission.
Interviewer: Et que fait-il aujourd’hui ?
Basma bint Saoud bin Abdel Aziz: Quand il fut établi par mon défunt père, son objectif était de surveiller la société civile, afin de permettre aux citoyens de vivre honorablement, sans corruption ni pots de vin. Mais le destin a voulu qu’il devienne un outil de pression sociale qui cible en priorité les Saoudiennes. Ils s’occupent de leurs visages et de leurs gants, de mixité et d’autres problèmes qui ont eu les conséquences sociales terribles dont nous pouvons aujourd’hui être témoins. Nous sommes devenus une société qui a peur de…
Interviewer: Dois-je comprendre que vous soutenez la demande de suppression du comité ?
Le Comité pour la promotion de la vertu et la prévention du vice doit superviser les ministères de la Justice et des Affaires sociales, non les femmes
Basma bint Saoud bin Abdel Aziz: Je suis pour la réforme du fonctionnement et des objectifs de ce comité, pour l’orienter vers [la supervision des] ministère de la Justice et des Affaires sociales – de tous les ministères exécutifs – afin qu’il s’acquitte de la mission pour laquelle il a été créé.
Interviewer: Mais ce comité semble bien accepté. Il est soutenu par des organismes officiels, et comme vous savez, il existe un accord historique entre la famille Aal Saoud et l’establishment religieux.
Interviewer: Oui. C’est ainsi depuis la formation de l’union. L’objectif de cette union était de réformer la société, non de la démolir. Or nous assistons actuellement à sa destruction.
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“Il est difficile de réformer ce comité, érigé sur des fondations totalement bancales”
Personnellement, je pense que pour être efficace… Il est difficile de réformer ce comité, érigé sur des fondations totalement bancales…
Quant à l’abolition du comité pour en créer un nouveau, avec une planification précise de ses objectifs, de ses responsables et de ses autorités… dans mon article, j’ai conseillé…
Interviewer: Vous avez vous-même reçu des conseils.
Basma bint Saoud bin Abdel Aziz: En effet. Le conseil que je donne dans ma chronique est de placer à la tête du comité des diplômés universitaires, des experts, des sociologues et des psychologues, connaissant également les enseignements religieux, comme il sied aux cheikhs et aux membres d’un tel comité… De cette manière, ils pourraient remplir leur mission correctement.
On m’a conseillé de ne pas évoquer ces sujets, afin de ne pas me retrouver à aborder des sujets que je maîtrise mal, comme les autorités.
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Ces révolutions résultent des pressions exercées sur ces peuples pendant près de 200 ans, en tous cas depuis le début de la Première guerre mondiale. Aujourd’hui, ces révolutions sont devenues une force qui ne connaît qu’un mot: “Liberté”.
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Interviewer: L’Arabie saoudite est-elle à l’abri des vents du changement ?
“Nul n’est à l’abri des vents saisonniers qui balaient notre nation arabe”
Basma bint Saoud bin Abdel Aziz: Nul n’est à l’abri des vents saisonniers qui balaient notre nation arabe. Celui qui prétend être à l’abri a tort. Tout le monde peut être atteint et tous devraient faire attention et savoir qu’il est temps d’entamer un dialogue national, sans attendre une amplification des défis. Nous devons accorder des libertés avant qu’elles ne se transforment en défis.
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