Ci-dessous des extraits d’une interview de l’ancien député irakien Ayad Jamal Al-Din, diffusée sur Al-Arabiya le 12 juillet 2010:
Interviewer: Après-demain, ce sera le vide constitutionnel. J’aimerais en évoquer les implications avec vous: jusqu’à quel point cela affectera-t-il la situation en Irak et en quoi ce vide est-il redoutable ?
Ayad Jamal Al-Din: Merci. Au nom d’Allah le Clément, le Miséricordieux, je ne pense pas que ce vide constitutionnel représente un problème compliqué, parce que cela fait longtemps que la constitution est enfreinte par ceux-là même qui l’ont mise en place. De nombreux articles et lois ont été enfreints ces dernières années. Ainsi la Cour suprême fédérale est aujourd’hui politisée et les spécialistes de la constitution de cette Cour sont capables de trouver le moyen de se sortir de ce prétendu problème.
Le problème en Irak dépasse largement la sphère légale constitutionnelle. Il existe une impasse entre les deux grands blocs, l’Etat de la Coalition de la loi et le parti de la Liste irakienne, concernant la personne la mieux indiquée pour remplir le poste de Premier ministre. A mon avis, ce problème ne sera pas résolu par les négociations, parce que la controverse ne porte pas sur le programme politique ; elle porte sur le [choix] des personnes.
A mon humble avis, le fractionnement du pouvoir est inévitable – deux ans avec le Dr Ayad Allaoui au pouvoir et deux ans avec Al-Malaki – si l’on veut établir un gouvernement rapidement, afin d’aider les Irakiens [à se sortir de la] crise.
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Je ne pense pas qu’un quelconque homme politique irakien, moi-même inclus, ne considère la présence américaine en Irak comme de ‘l’occupation’. Il y a consensus sur la présence américaine en Irak, le mouvement sadriste mis à part. Ce qui est contesté est la présence iranienne en Irak. Certains espèrent que la Liste irakienne sauvera l’Irak de l’influence iranienne. À mon avis, ils sont trop optimistes.
Je trace un parallèle entre la Liste irakienne et la Coalition du 14 mars au Liban. Elles sont tout à fait identiques, ont les mêmes supporters et la même approche. Pour mieux comprendre, les téléspectateurs irakiens devraient revenir au discours du 14 mars avant que Saad Al-Hariri ne devienne premier ministre. Voyez comment ils s’élevaient contre l’influence iranienne au Liban. Mais dès son arrivée au pouvoir, le Premier ministre libanais est devenu le plus fervent défenseur de la résistance.
Nous assistons au même phénomène avec la Liste irakienne – la Coalition irakienne du 14 mars. Nous entendons certains évoquer la confrontation avec l’Iran en Irak, mais je suis convaincu que dès qu’ils mettront la main sur la moitié du pouvoir – et plus encore s’ils en obtiennent l’intégralité – les dirigeants de cette liste deviendront les plus fervents défenseurs de la présence iranienne en Irak.
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Aux Etats-Unis, on ne veut pas entendre parler de l’Irak. Ils veulent se retirer et c’est tout. Ils ne veulent pas reconnaître que leur plan a échoué, parce que cela aurait des répercussions intérieures négatives, à l’approche des élections de novembre. Les Etats-Unis ne peuvent pas trouver de solution, ni même s’occuper de trouver une solution. Ce qui compte [pour eux], c’est que l’Irak ne représente pas un danger, afin que le gouvernement et le Congrès puissent affronter l’Iran et résoudre de manière globale ce problème au Moyen-Orient.
Par conséquent, que Biden vienne ou non, ils n’auront rien de nouveau à offrir. Ils ont laissé le problème aux mains des parties rivales en Irak, lesquelles se battent pour des positions politiques, et non au sujet du programme que devrait suivre le pays.