Le magazine hebdomadaire du quotidien El-Khabar a dernièrement publié une interview de Mashaal Al-Mutairi, un opposant saoudien que le magazine présente comme l’ancien chef des services de renseignements saoudiens ; il a quitté l’Arabie saoudite et se trouve actuellement aux Pays-bas. Al-Mutairi révèle la forte influence du ministre saoudien de l’Intérieur – le prince Nayef – et évoque les tentatives du Roi Abdallah et du prince héritier, le prince Sultan, pour empêcher le ministre de l’Intérieur d’accéder un jour à la royauté.
Voici des extraits de l’article: [1]
Le ministre de l’Intérieur place les lignes téléphoniques sur écoute, y compris dans le bureau du roi.
El-Khabar: A votre avis, quelle est la force de sécurité la plus déterminante en Arabie saoudite ?
Mashaal Al-Mutairi: Sans aucun doute, le ministre de l’Intérieur et les siens ; ils sont déployés en tous lieux et sont beaucoup plus nombreux que les militaires et le personnel du renseignement. L’un des secrets de la force du ministère de l’Intérieur est qu’il espionne tous les moyens de communication – les téléphones, les faxes et Internet. Il a deux immeubles où l’on passe son temps à mettre sur écoute les conversations téléphoniques… y compris celles du bureau du roi, des services de renseignement et des ambassades.
El-Khabar: Pensez-vous que le pouvoir du ministre de l’Intérieur tient aussi au contrôle de la Police religieuse – de l’Autorité pour la promotion de la vertu et la prévention du vice ?
Al-Mutairi: Certainement. La Police religieuse agit sur l’ordre du ministère de l’Intérieur, bien qu’officiellement, elle fasse partie du ministre des Cultes et qu’elle dispose de la juridiction contre les faibles citoyens. Quant au prince (Nayef), il est intouchable et n’est pas soumis aux limitations des lois et des châtiments…
El-Khabar: Il y a plusieurs années, un membre de la famille au pouvoir a failli être exécuté après avoir tué un citoyen, et il aurait été abattu si le père de la victime ne lui avait pas pardonné.
Al-Mutairi: Ce fut un spectacle très clair, vu qu’ils ont menacé d’assassiner la victime du père s’il ne laissait pas tomber l’affaire. Le seul prince mis à mort selon la loi fut Faysal Ben Mousaid, l’assassin du roi Faysal. Quant au châtiment des princes, celui-ci consiste toujours en un enfermement forcé dans un palais bondé de domestiques, ou dans des quartiers spéciaux appelés “prison” qui ont tout d’hôtels cinq étoiles. Après quoi, ils sont tranquillement libérés.
Le roi Abdallah et le prince héritier ont comploté pour empêcher le prince Nayef d’accéder au trône
El-Khabar: Pensez-vous que le rôle déterminant du (ministre de l’Intérieur) le prince Nayef en fera le prochain roi ?
Al-Mutairi: Le roi Abdallah et le prince (héritier) – le prince Sultan – ont comploté pour empêcher le prince Nayef d’accéder au trône en éliminant le poste de second vice-Premier ministre. Les chances qu’a Nayef de devenir roi resteront importantes tant qu’il n’y aura pas d’intervention étrangère.
El-Khabar: Vous faites référence aux Etats-Unis ?
Al-Mutairi: Oui.
[1] El-Khabar Al-Usbu’i (Algérie), le 4 novembre 2006