Voici la troisième dépêche de MEMRI sur le rôle de l’Iran dans la récente escalade des violences au Liban et en Israël. [1] Les 12, 13 et 14 juillet 2006, les médias iraniens, libanais et syriens ont publié des articles et des déclarations sur l’explosion du conflit entre Israël et le Hezbollah. Extraits:
Réactions iraniennes
Le président Ahmadinejad: L’Iran fait de son mieux pour maintenir une approche constructive de la question nucléaire ; tout problème posé à l’Iran dans la région nuira à toutes les parties.
Dans une conversation téléphonique avec le président syrien Bashar Al-Assad, le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a déclaré: “Si le régime qui occupe Jérusalem commet le crime stupide d’attaquer la Syrie, cela équivaudra à une attaque contre tout le monde islamique. Ce régime devra (alors) faire face à une réaction encore plus dure (…) Les attaques insensées (d’Israël) révèlent la faiblesse extrême et l’impotence de ce faux régime, qui conduiront à sa proche destitution.”
Dans des apparitions publiques au nord de l’Irak, Ahmadinejad a affirmé qu’en raison de sa nature agressive, le régime sioniste était incapable d’exister en paix..
Il a en outre mis en garde les “grandes puissances” contre le soutien aux “crimes du régime sioniste… (car) la poursuite de ces crimes et du soutien (qui leur est accordé) attiseront les flammes de la colère des musulmans, qui les annihilera tous.”
Evoquant le problème nucléaire, Ahmadinejad a déclaré que l’Iran répondrait à la proposition européenne vers la fin du deuxième mois de l’été (ndlr le 22 août), estimant que “le temps n’a pas une importance majeure dans les pourparlers nucléaires” (…)
Il a ajouté que l’Iran faisait de son mieux pour maintenir une approche constructive du problème, mais que les Etats-Unis cherchaient à créer des tensions. Il a averti que tout problème posé à l’Iran dans la région nuirait à tous. [2]
Ali Larijani, secrétaire du Conseil supérieur de sécurité nationale en Iran, a condamné les attaques du régime sioniste contre le Liban, affirmant que l’Iran soutiendrait le peuple libanais dans sa résistance contre les sionistes. Larijani a souligné que les actions des sionistes encourageraient la poursuite de la résistance dans la région. [3]
Réactions libanaises
Walid Joumblatt: en kidnappant ces deux soldats, le Hezbollah joue un jeu très dangereux ; le Hezbollah pratique une surenchère, soutenue par l’Iran et la Syrie – qui est devenue depuis un an un Etat satellite de Téhéran
Dans un entretien, le député druze libanais Walid Joumblatt a confié au Figaro: “(…) en kidnappant ces deux soldats, le Hezbollah joue un jeu très dangereux. Nous ne sommes plus dix ans en arrière. Israël a évacué le Liban. Ces enlèvements dépassent les frontières de notre pays. Le Hezbollah pratique une surenchère, soutenue par l’Iran et la Syrie – qui est devenue depuis un an un Etat satellite de Téhéran. Etant donné l’absence d’initiative arabe et occidentale sur le dossier israélo-palestinien, c’est l’Iran et la Syrie qui ont pris la relève, et dans ce cadre-là, le Liban est un champ de bataille naturel.”
“Mais le Hezbollah va devoir s’expliquer devant les Libanais. Dans le cadre du dialogue national, nous étions en train de discuter d’une nouvelle stratégie de défense: en clair, de qui relève la décision de la guerre et de la paix dans ce pays.” [4]
Le gouvernement libanais: c’est la responsabilité du gouvernement d’exercer sa souveraineté dans tout le Liban
Suite à une session spéciale du 13 juillet 2006, le gouvernement libanais a publié la déclaration suivante: “Le gouvernement du Liban souligne qu’il est responsable de la défense de la patrie et de ses citoyens, de leur sécurité et de leur bien-être. De même, c’est la responsabilité (du gouvernement) de contrôler tout le territoire libanais, d’exercer sa souveraineté et de décider de la politique nationale intérieure et extérieure.”
Quand on lui a demandé si cette déclaration signifiait que l’armée libanaise allait se déployer au Sud Liban, Le Premier ministre Fuad Al-Siniora a répondu: “Nous n’avons pas évoqué ce problème.” [5]
L’ancien président libanais Amin Jumail: le Liban refuse d’être le fer de lance du conflit israélo-arabe
L’ancien président libanais Amin Jumail a déclaré sur Al-Jazeera le 12 juillet 2006: “Ce qui est arrivé aujourd’hui est très dangereux (…) Nous savons tous que les décisions relatives à la guerre et à la paix sont des décisions de souveraineté (nationale) devant être prises par le gouvernement. L’initiative du Hezbollah va empêtrer le pays dans des actions militaires controversées (…) C’est un grand danger pour le Liban, qui ne souhaite pas jouer le rôle de fer de lance du conflit israélo-arabe tant que la frontière syrienne est calme et qu’aucun coup de feu (n’est tiré) depuis la Syrie sur les Hauteurs du Golan.” [6]
Le jour suivant, Jumail a déclaré sur la télévision iranienne Al-Alam: “Les événements actuels résultent de la décision d'(un) parti politique (le Hezbollah), et non d’une décision du gouvernement libanais. Toute initiative menant à la guerre – et c’est clairement le cas de l’initiative actuelle – doit correspondre à un minimum d’entente nationale au niveau des institutions constitutionnelles libanaises (…)
Le gouvernement libanais a été vaincu. Il existe des forces partisanes qui prennent des décisions unilatérales, sans consulter qui que ce soit. Elles ont la capacité d’appliquer (leurs décisions), et le gouvernement (libanais) n’a plus qu’à s’accommoder de cette nouvelle situation.” [7]
Le ministre libanais des communications: le vice-président syrien donne les ordres, le Hezbollah les exécute.
Dans un entretien, le ministre libanais des Communications Marwan Hamada a confié au quotidien libanais Al-Mustaqbal: “Le vice-président syrien Farouq Al-Shar donne les ordres, le Hezbollah les exécute, et le Liban se retrouve otage (des instructions syriennes).” [8]
De hautes responsables des Forces du 14 mars critiquent l’opération
Les Forces du 14 mars, une union de plusieurs factions et partis libanais dirigés par Saad Al-Hariri, chef du parti Al-Mustaqbal, le leader druze Walid Joumblatt et le commandant des Forces libanaises Sami Geagea, se sont déclarés “contre l’inclusion du Liban aux considérations des forces régionales, qui n’ont rien à voir avec le intérêts libanais, et qui cherchent à récolter de façon opportuniste bénéfices et profits aux dépens du peuple libanais et de ses sacrifices. Les Forces du 14 mars insistent en outre sur l’unité du Liban face à une attaque israélienne (…) Elles soulignent également que nul élément, local ou externe, ne peut déterminer seul les priorités dans la campagne contre l’ennemis israélien (…)” [9]
Samir Geagea a déclaré: “Mettons de côté le succès (du Hezbollah)… Aucun groupe libanais ne peut jouer le destin de tout le peuple libanais par une décision unilatérale. Il y a de nombreux détenus (libanais) dans les prisons syriennes. Est-il concevable d’enlever des soldats syriens pour ensuite mener des négociations visant à les libérer ?” [10]
Un patriarche maronite: Il serait difficile de désarmer le Hezbollah, vu qu’il est dirigé par la Syrie et le Liban
A son retour des Etats-Unis, le patriarche maronite Mar Nasrallah Boutros Sfeir a déclaré lors d’une conférence de presse: “Nous dénonçons les dernières attaques israéliennes contre le peuple libanais et les infrastructures (libanaises). Mais nous espérons aussi que le Hezbollah va déposer les armes pour chercher avec tous les citoyens libanais une solution politique à tous les problèmes du Liban.” [11] Il ajoute que “nul ne consent” à ce que le Hezbollah conserve ses armes, mais a relevé qu’il était “difficile de le désarmer, puisque c’est la Syrie et l’Iran qui le dirigent.” [12]
Réactions syriennes
Le quotidien gouvernemental syrien Al-Baath: les Israéliens refusent de tirer la leçon (des événements) et lancent donc des accusations contre les forces régionales
Dans un éditorial, le quotidien gouvernemental syrien Al-Baath publie: “Le gouvernement israélien n’a toujours pas compris que l’occupation des terres arabes a un prix qu’il lui faudra payer aujourd’hui, demain et chaque jour, comme par le passé (…) Aujourd’hui, les combattants de la résistance arabe au Liban, à Gaza et en Cisjordanie insistent là-dessus.
La logique veut que l’occupation et l’agression (ne peuvent se poursuivre) sans résistance. Voilà qui obligera Israël à reconnaître les droits des Arabes, à se retirer des territoires occupés et à payer le prix de ses agressions contre les Arabes qui durent depuis de longues décennies (…)
Ces criminels et ceux de leur espèce (ndlr les dirigeants israéliens) peuvent bien parler (…) et lier l’opération (du Hezbollah) à des éléments de la région. La (décision) demeure entre les mains de ceux qui se trouvent sur le terrain (…) Ce sont les combattants de la résistance qui choisissent l’emplacement, le moment et la cible de leurs actions. A en croire les derniers événements, les leaders de l’occupation, qui sont tout à fait conscients de ces faits, ne souhaitent pas tirer la pénible leçon des faits. En conséquence, ils se hâtent d’exporter la crise, de lancer des accusations (contre les forces régionales) et de formuler des menaces vides, qui n’ont pas apporté et n’apporteront pas la sécurité à Israël.
La solution est plus simple qu’ils ne l’imaginent ; elle commence par le retrait israélien de chaque parcelle de terre occupée et la libération des prisonniers détenus dans les prisons de l’occupation. Si les dirigeants israéliens pensent autrement, cela prouve qu’ils n’ont toujours pas su tirer la leçon du passé et qu’ils ont besoin de recevoir encore une leçon.” [13]
[1] Pour consulter les 1ère et 2ème parties du rapport, voir les dépêches spéciales n° 1204 et 1205 sur www2.memri.org/french.
[2] IRNA, le 13 juillet 2006.
[3] IRNA, July 14, 2006.
[4] http://www.lefigaro.fr/international/20060713.FIG000000066_walid_joumblatt_le_hezbollah_pratique_la_surenchere.html, 13 juillet 2006.
[5] Al-Nahar (Liban), 14 juillet 2006.
[6] http://www.lebanese-kataeb.com/modules/news/article.php?storyid=1148, 12 juillet 2006.
[7] http://www.lebanese-kataeb.com/modules/news/article.php?storyid=1160, 13 juillet 2006.
[8] Al-Mustaqbal (Lebanon), 14 juillet 2006.
[9] Al-Nahar (Liban), 14 juillet 2006.
[10] http://www.thisissyria.net/2006/07/13/syriatoday/12.html, 13 juillet 2006.
[11] Al-Nahar (Liban), 14 juillet 2006.
[12] http://www.thisissyria.net/2006/07/13/syriatoday/12.html, 13 juillet 2006.
[13] Al-Baath (Syrie), 13 juillet 2006.