L’organisation « Islamic Media Watch » installée à Londres a récemment conduit un entretien avec Khaled Al-Dosari, l’Islamiste koweïtien le plus recherché. Il est accusé de tentative de renversement du gouvernement et d’attentats à la voiture piégée contre des convois militaires américains au Koweït.
Dans l’entretien, Al-Dosari, qui s’estime être «un militant des droits de l’homme et porte-parole de l’Association des Victimes de la Torture de la Détention Administrative», explique que les autorités koweïtiennes le recherchent pour avoir révélé des violations des droits de l’homme au Koweït. Il assure n’avoir aucun lien avec Al-Qa’ida et que l’organisation «les Lions d’Al-Jazeera» – qui serait selon les autorités koweïtiennes responsable des récents attentats aux Koweït- est une invention de des services de sécurité koweïtiens. Il déclare que ‘Amer Al-‘Anzi, considéré comme le chef de l’organisation et mort récemment dans une prison koweïtienne, a été assassiné par les autorités koweïtiennes obéissant aux injonctions américaines. Al-Dosari a juré de le venger.
Voici des extraits de l’interview: [1]
Les autorités koweïtiennes ont tué ‘Amer Al-‘Anzi sur ordre des américains; nous vengerons son sang
Question: «Pouvez-vous nous éclairer sur ce qui est réellement arrivé à ‘Amer Al-‘Anzi et qui en est responsable? Quels étaient vos liens avec ‘Amer Al-‘Anzi?»
Al-Dosari: «…J’ai fait connaissance avec lui après qu’il ait été arrêté par l’appareil sécuritaire de l’état en 2003. Il était torturé sans inculpation pour quelque motif que ce soit, mis à part [le fait] qu’ils cherchaient un suspect. Après sa remise en liberté je lui ai rendu visite dans sa maison et il m’a dit que l’appareil sécuritaire de l’état avait commis de flagrants abus [de ses droits]. Je suis tombé d’accord avec lui qu’il était nécessaire d’agir pour mettre fin à ces violations en portant devant de hauts fonctionnaires les plaintes et les voix des victimes de ces abus. Il pensait que les hauts fonctionnaires ignoraient totalement ce qui se passe dans les cellules des prisons de sécurité de l’état. Nous avons commencé à prendre contact avec des hauts fonctionnaires du pays et avons parlé de cela, via des intermédiaires…
Après du temps et des efforts, nous sommes devenus persuadés que les violations des droits de l’homme au Koweït se font à la connaissance du gouvernement et avec son assentiment. Je veux dire par là [la connaissance et l’assentiment du] Premier Ministre Sabah Al-Ahmad, dans la mesure où il est responsable de ces abus et qu’il est imbu de mépris pour un large secteur de la population – les tribus. De même il est connu pour sa haine de toute manifestation de l’Islam et de la religion et pour quiconque fervent dans sa foi…»
Question: «Quels étaient vos liens avec ‘Amer Al-‘Anzi?»
Al-Dosari: «Le sang d »Amer et de ses frères n’est pas de l’eau, et nous allons entrer dans le cycle de la vengeance. [Le directeur de l’appareil sécuritaire du pays] ‘Adhbi Al-Sabah a trompé et trahi ‘Amer en lui disant:«Laissez les jeunes se rendre et ils feront l’objet immédiatement de poursuites judiciaires». La même chose a eu lieu lorsque qu’ils sont entrés chez lui de force et l’ont arrêté. Mais il [‘Adhbi Al-Sabah] a éliminé le «Bidun» [un groupe auquel on refuse la citoyenneté koweïtienne] [2] et éliminé les Saoudiens en pensant qu’il s’agissait de misérables sans protection et personne pour venger leur sang…»
Question: «Quelles étaient les intentions d’Al-‘Anzi?
Al-Dosari: «’Amer et ses amis entendaient se rendre en Irak, mais les autorités les ont tués sur ordre des américains.»
Les accusations à mon encontre sont fausses. Leur but est de m’empêcher de soutenir les droits de l’homme au Koweït
Question: «Qu’avez vous à dire au sujet des accusations dont vous êtes l’objet?»
Al-Dosari: «Les accusations sont nombreuses et ont pour but d’étouffer les cris [de protestation]. Ce qui n’arrivera pas. Moi et mes frères… continueront de dévoiler leur bassesse, jusqu’à ce qu’ils retrouvent le droit chemin, changent leur politique et [cessent] leurs flagrantes violations des droits de l’homme élémentaires des citoyens koweïtiens.»
Question: «Les autorités vous décrivent comment le chef [d’un groupe terroriste]. Est-ce vrai?
Al-Dosari: «C’est un mensonge et une accusation fausse. On essaie de me tenir pour responsable de ce qui se passe afin de m’empêcher de défendre les victimes de la torture et de m’opposer aux violations des droits de l’homme de mes compatriotes perpétrées par les autorités.»
Question: «Que faites-vous donc qui dérange les autorités?»
Al-Dosari: «Je dévoile leur infamie avec le soutien des militants des droits de l’homme de «l’Association des Victimes de la Torture et de la Détention Administrative» au Koweït. De plus, leurs décisions arbitraires contre la jeunesse musulmane sont révélées dans la presse. Je me suis adressé [aux médias] seulement une fois que les portes nous furent fermées…»
Nous n’avons aucun lien avec Al-Qa’ida: le but n’était pas de commettre des attentats au Koweït mais plutôt de mener le Jihad en Irak
Question: «Les autorités affirment que vous [et vos associés] formez une cellule des Lions d’Al-Jazeera [ Usud Al-Jazeera ]. Pourquoi ce nom?
Al-Dosari: «Ce sont de fausses allégations. Il n’existe pas une chose telle que «les Lions d’Al-Jazeera». Ce nom est l’invention de l’appareil sécuritaire de l’Etat. Ces jeunes [qui ont été emprisonnés en même temps qu’Al-‘Anzi] avaient décidé d’aller mener le Jihad au nom d’Allah en Irak. Les autorités ont eu vent de leurs intentions et ont voulu les arrêter. Et maintenant les autorités les éliminent car s’ils étaient jugés aucune preuve ne serait trouvée contre eux. Les histoires d’armes trouvées en leur possession sont une exagération et un prétexte pour les arrêter et les tuer. L’allégation qu’ils ont tenté d’exécuter des opérations contre des intérêts américains avec les armes en leur possession est fausse. Le régime le sait très bien. Les armes en leur possession n’étaient que des armes personnelles. Ils se sont équipés d’armes d’autodéfense après que [la division] des enquêtes ait commencé à les traquer et ait essayé de les tuer…
Si ces jeunes avaient voulu opérer à l’intérieur du Koweït ils l’auraient fait il y a longtemps, mais ils ne pensaient pas qu’il y avait quoi que ce soit à gagner d’opérations au Koweït, étant donné la composition démographique et géographique particulière de notre pays, qui les écartait de tels projets. De plus, il existe un complot contre le futur de l’Islam au Koweït et [même] la moindre opération risquait de conduire à l’anarchie. Mais ces jeunes n’avaient absolument pas l’intention de le faire puisqu’ils savent que le régime est fragile et risque de s’effondrer…»
Question: «Y a-t-il des liens entre vous et l’organisation d’Al-Qa’ida?»
Al-Dosari: «Il n’y a pas de lien entre nous autre que le sang et la religion que nous partageons.»
Je ne me rendrai pas; l’Islam ne s’accomplit que par le Jihad
Question:«Quelle est la réelle situation sécuritaire au Koweït? Y a-t-il un vrai danger menaçant le pays?»
Al-Dosari: Il ne fait pas de doute qu’un changement se profile dans la région et que les attributs [de la région] vont changer. Ce qui ce passe au Koweït est part de cette phase. Il existe de sérieux problèmes et on voit l’expression d’une discrimination et d’un harcèlement du peuple [koweïtien]. De plus, il y a un occupant [au Koweït] qui a traversé les océans et parcourt notre pays armé de toutes sortes d’armes ultra modernes. Selon la constitution koweïtienne, l’occupant jouit du même [niveau d’immunité] que celui du Amir, si bien qu’un soldat américain peut faire ce qui lui plaît dans le pays et vous n’avez pas le droit de vous y opposer. Le pays est devenu une province américaine, sans souveraineté…»
Question: «Vous rendriez-vous aux autorités? Vous a-t-on déjà demandé de vous rendre?»
Al-Dosari: «J’aime mieux la mort que [la prison]… Auprès de qui devrais-je me rendre? Auprès de l’oppresseur pour qu’il puisse m’opprimer et me torturer? Je devrais me rendre sachant que mon destin serait celui du Cheikh ‘Amer [Al-‘Anzi]? Si je pouvais croire en la justice et le respect des droits de l’homme, j’irai de mon propre gré, mais je suis convaincu qu’ils veulent me tuer…»
Question: «Quel est votre message à votre peuple, vos frères, vos amis et le peuple en général?»
Al-Dosari: «Je leur dis que je défends fermement mes principes. Leurs [les autorités] menaces de me tuer ne me détourneront pas de ma religion. Je ne crains pas de mourir en Musulman, même si j’ignore où je me rendrai [au paradis ou en enfer]. La religion ne s’accomplit dans l’âme d’un Musulman et parmi le peuple qu’à travers le Jihad au nom d’Allah, sous toutes ses formes. La religion peut dompter le mal de ceux qui corrompent le pays seulement par l’usage de la force, qui les effrayera, et seulement par le Jihad, qui brisera leur pouvoir. Sans Jihad le pays serait à jamais perverti et les mosquées tomberaient en ruines. La lutte entre le vrai et le faux est une sunna [mode de vie] légitime. Le parti du faux est toujours plus grand que le parti du vrai. Ils seront vaincus et leur mal ne sera arrêté que par le jihad. Beaucoup de gens n’écoutent la vérité que lorsque l’usage de la force les pousse à le faire.»
[1] Al-Quds Al-‘Arabi (Londres), 14 février 2005.
[2] Pour le « bidun, » voir: http://www.hrw.org/arabic/mena/list/text/bidun3.htm; http://www.hrinfo.net/en/discussion/2004/bk.shtml