Le chroniqueur Fahd Al-Fanik, de tendance libérale, a publié dans le quotidien Al-Rai un article intitulé: “Pourquoi Friedman enflamme-t-il notre colère?” Voici l’article intégral:
Il est normal que le chroniqueur Thomas Friedman soit devenu une célébrité dans le monde arabe. Pas uniquement parce qu’il écrit dans le New York Times, premier journal américain: les autres chroniqueurs de ce journal n’ont pas une telle renommée. Sa célébrité tient aussi au fait que ses articles portent sur le Moyen-Orient et nous interpellent donc tant que certains journaux arabes les traduisent et les publient.
Il est également normal que Friedman s’attire la haine de plusieurs personnes et devienne la cible de critiques et même d’attaques – pas uniquement parce qu’il est juif, et donc amené à adopter des partis pris défavorables aux intérêts arabes et favorables à Israël, mais aussi parce qu’il manque de diplomatie, nous mettant en face de nos défauts sans tenir compte de notre sensibilité à fleur de peau!
Friedman en contrarie plus d’un quand il salit la culture et les régimes arabes. Peut-être cherche-t-il à casser le moral des Arabes, mais leurs défauts ne sont pas pour autant une invention de sa part. Ces défauts existent [bel et bien], et nous préférerions que personne ne nous les rappelle!
J’ai parcouru un certain nombre des articles de journalistes arabes écrits contre lui, et je me suis rendu compte qu’ils lui reprochent surtout de relever des défauts existants, dont nous ferions mieux de reconnaître l’existence pour essayer de les corriger. En tant qu’Américain, il est en droit d’exiger qu’un grand Etat arabe [l’Egypte] se soumette à la volonté des Etats-Unis, s’il tient à continuer de recevoir les milliards de dollars fournis par le contribuable américain. Il a le droit de dire à un autre Etat arabe [l’Arabie Saoudite] que ses écoles produisent des terroristes. Il a les droit de reprocher aux leaders palestiniens de rater les occasions qui leur sont offertes, préférant s’aligner sur la vaine opinion populaire.
Dans son dernier article, Friedman a énoncé les facteurs qui pourraient empêcher l’Amérique d’attaquer l’Iraq – non parce qu’il aime l’Iraq, mais parce que les Etats-Unis ne trouveront pas d’alliés dans ce sens: la Russie a des intérêts commerciaux avec l’Iraq; la Turquie craint la naissance d’un Etat kurde au Nord; l’Arabie Saoudite craint la naissance d’un Etat chiite au Sud; la Jordanie pense à ses intérêts commerciaux et pétrolifères. La Syrie craint que son tour ne vienne après l’Iraq; et l’Egypte ne veut pas d’un régime iraquien qui s’alignerait sur la politique des Etats-Unis et rivaliserait avec elle pour le pouvoir dans le monde arabe.
Dans sa chronique, Friedman a composé des lettres hypothétiques du président américain à l’attention de Moubarak, Assad et Arafat. En mai dernier, je lui ai demandé pourquoi il n’écrivait pas de lettre à Sharon. Il m’a dit qu’il y travaillait et la publierait bientôt. Promesse non tenue jusqu’à ce jour. [1]